Ehden, la ville désertée et retranchée dans la neige des hautes montagnes, vit dans la mémoire de la population durant les neuf mois passés à Zghorta comme le symbole d’un été promis et attendu. Dans la représentation zghortiote du temps, se juxtaposent deux durées : celle de Zghorta, et celle d’Ehden. Et la vie n’est qu’un passage perpétuel de l’endroit d’en haut, où le temps est aussi court que l’été, à l’endroit d’en bas, où le temps s’allonge comme s’allongeaient les automnes et les hivers[1].
 
Je me suis rendue à deux reprises au Liban, une première fois, début septembre, à Ehden, et j’y ai rencontré une douzaine d’habitants qui m’ont fait découvrir leur quotidien et leur ville d’origine perchée à 1500 mètres d’altitude où ils passent leurs étés depuis toujours. Lors de mon second séjour en novembre, j’ai revu ces mêmes habitants, mais à Zgharta où ils ont leur second domicile ou lieu de travail qu’ils occupent entre octobre et juin. Depuis 500 ans, la population de ces deux villes qui n’en forment officiellement qu’une, effectuent collectivement la migration de la ville basse, limitrophe de Tripoli, vers la ville haute, au cœur des montagnes libanaises, située à 25 minutes en voiture de la première.

Le travail photographique que j’ai réalisé se présente comme un portait des modes d’habiter et de vie de ces personnes vivant en double domiciliation. Pour chacune, j’ai souhaité montrer une photographie de leur lieu de vie à Ehden dialoguant avec une photographie de celui de Zgharta ainsi qu’un extrait de leur témoignage afin de montrer la manière dont ces deux endroits sont constitutifs de leur mode de vie. Dialogue avec cette série, un autre ensemble de photographies de paysages signifiant le passage d’une ville à l’autre, à travers des images prises depuis chez les habitants et donnant à voir les extérieurs. Lors de mon second séjour au Liban, j’ai eu l’occasion d’échanger avec plusieurs femmes vivant à Ehden-Zgharta et grâce auxquelles j’ai pu découvrir plus en détail la particularité de la vie zghortiote et l’attachement à leur région, à leur culture et à leur entourage. Ces rencontres m’ont conduites à réaliser une autre série d’images montrant ces femmes photographiées en extérieur, dans l’espace urbain.


[1] Antoine Douaihy, "La société de Zghorta: structures socio-politiques de la montagne libanaise 1861-1975", Paris, Geuthner, 2010, p.243.

 

De Ehden à Zgharta

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  • On a trois filles et un garçon, toute la famille vit dans la même maison Ehden. On arrive tôt à Ehden, mon mari est là depuis avril et on ne retourne à Zgharta qu’en novembre car nous sommes cultivateurs. Nous cultivons des fruits à Ehden et des olives à Zgharta pour la famille et s’il en reste, on les vend. En hiver, mon mari ne travaille pas, il reste à la maison. Pour beaucoup d’habitants, Zgharta représente le travail alors que pour nous, c’est l’inverse, le travail est à Ehden et, à Zgharta, on s’occupe juste de la récolte des oliviers puis on se repose. Lorsqu’on descend à Zgharta pour l’hiver, on prend nos affaires personnelles et aussi les confitures et conserves qu’on a faites durant l’été. Le mode de vie des zghortiotes est très original, il est lié à notre culture. Je pense que cette habitude va perdurer avec nos enfants parce que c’est inscrit dans notre corps. Mais aujourd’hui, il y a des problèmes économiques dans le pays qui font que certains ne peuvent plus le faire.
  • On a trois filles et un garçon, toute la famille vit dans la même maison Ehden. On arrive tôt à Ehden, mon mari est là depuis avril et on ne retourne à Zgharta qu’en novembre car nous sommes cultivateurs. Nous cultivons des fruits à Ehden et des olives à Zgharta pour la famille et s’il en reste, on les vend. En hiver, mon mari ne travaille pas, il reste à la maison. Pour beaucoup d’habitants, Zgharta représente le travail alors que pour nous, c’est l’inverse, le travail est à Ehden et, à Zgharta, on s’occupe juste de la récolte des oliviers puis on se repose. Lorsqu’on descend à Zgharta pour l’hiver, on prend nos affaires personnelles et aussi les confitures et conserves qu’on a faites durant l’été. Le mode de vie des zghortiotes est très original, il est lié à notre culture. Je pense que cette habitude va perdurer avec nos enfants parce que c’est inscrit dans notre corps. Mais aujourd’hui, il y a des problèmes économiques dans le pays qui font que certains ne peuvent plus le faire.
  • J’aime beaucoup Ehden, je la préfère à Zgharta. Je monte à Ehden fin mai et je ne reviens pas à Zgharta avant fin octobre début novembre. Je ne vais à Zgharta durant l'été que si je n'ai pas le choix car on ne peut pas faire toutes les formalités administratives à Ehden.
    En été, je suis chef de cuisine, je travaille avec mon fils qui loue des restaurants qu'il gère. Je fais ce travail jusqu'à la fin de la saison. A partir d’octobre, je fais la mélasse de grenadine qu'on utilise dans nos salades, surtout la fatouche. En novembre, je m'occupe de la récolte des olives à Zgharta, de faire l'huile d'olive et de fabriquer du savon avec les olives qui ne sont pas comestibles. Pendant l'hiver, je passe mon temps dans ma mercerie qui est à Zgharta. Je fais le tricot, le crochet, le point de croix, la dentelle bretonne et tout le travail manuel.
  • J’aime beaucoup Ehden, je la préfère à Zgharta. Je monte à Ehden fin mai et je ne reviens pas à Zgharta avant fin octobre début novembre. Je ne vais à Zgharta durant l'été que si je n'ai pas le choix car on ne peut pas faire toutes les formalités administratives à Ehden.
    En été, je suis chef de cuisine, je travaille avec mon fils qui loue des restaurants qu'il gère. Je fais ce travail jusqu'à la fin de la saison. A partir d’octobre, je fais la mélasse de grenadine qu'on utilise dans nos salades, surtout la fatouche. En novembre, je m'occupe de la récolte des olives à Zgharta, de faire l'huile d'olive et de fabriquer du savon avec les olives qui ne sont pas comestibles. Pendant l'hiver, je passe mon temps dans ma mercerie qui est à Zgharta. Je fais le tricot, le crochet, le point de croix, la dentelle bretonne et tout le travail manuel. 
  • Les habitants de Zgharta sont divisés en 5 grandes familles : les Mouawad, les Frangieh, les Douaihy, les Karam et les Mekary. A cause des conflits internes entre les grandes familles, Zgharta était divisé en plusieurs quartiers, chacun regroupant une des grandes familles avec leurs partisans. Actuellement, ces quartiers abritent toujours les mêmes populations même si ça ne se ressent plus aussi fort car la paix règne maintenant entre les familles.  A cause de la guerre civile au Liban, Ehden s’est vidé pendant une quinzaine d’années entre 1975 et 1990 de tous ces résidents musulmans. Aujourd’hui, les musulmans sont retournés passer l’été à Ehden et plusieurs ont acheté des appartements ici.
    La plupart des habitants de Zgharta-Ehden ont deux maisons ; d’autres comme mon mari et moi qui travaillons à Beyrouth nous avons une troisième maison à Jounieh où nous passons l’hiver. Mais ce que tous les zghortiotes préfèrent et de loin c’est la maison d’Ehden. On a toujours l’impression à Ehden d’être en vacances, entre amis et parents ; je pense qu’on y passe nos plus beaux jours.
  • Les habitants de Zgharta sont divisés en 5 grandes familles : les Mouawad, les Frangieh, les Douaihy, les Karam et les Mekary. A cause des conflits internes entre les grandes familles, Zgharta était divisé en plusieurs quartiers, chacun regroupant une des grandes familles avec leurs partisans. Actuellement, ces quartiers abritent toujours les mêmes populations même si ça ne se ressent plus aussi fort car la paix règne maintenant entre les familles.  A cause de la guerre civile au Liban, Ehden s’est vidé pendant une quinzaine d’années entre 1975 et 1990 de tous ces résidents musulmans. Aujourd’hui, les musulmans sont retournés passer l’été à Ehden et plusieurs ont acheté des appartements ici.
    La plupart des habitants de Zgharta-Ehden ont deux maisons ; d’autres comme mon mari et moi qui travaillons à Beyrouth nous avons une troisième maison à Jounieh où nous passons l’hiver. Mais ce que tous les zghortiotes préfèrent et de loin c’est la maison d’Ehden. On a toujours l’impression à Ehden d’être en vacances, entre amis et parents ; je pense qu’on y passe nos plus beaux jours.
  • Je suis originaire de Zgharta et Ehden, je suis un pur zghortiote! Avant de faire ce travail, j'installais des chauffages, puis je suis tombé malade et j'ai dû arrêter ce travail et en trouver un autre. J'ai les deux supermarchés depuis l’année 2000. Je travaille 8 mois de l'année à Zgharta puis 4 mois à Ehden. Ma vie est très différente entre le moment où je suis à Ehden et celui où je suis à Zgharta. À Ehden, j'ouvre le supermarché à 8h30 et je le ferme entre 2 heures et 4 heures du matin. À Zgharta, j'ouvre entre 8 heures du matin et 10 heures du soir. Quand j'ouvre un des deux supermarchés, je ferme l'autre et j'amène toute la marchandise d'un supermarché à l'autre avec un pick'up. J’ai besoin de faire trois voyages pour tout déménager. A Ehden comme à Zgharta, la plupart des supermarchés ressemblent aux miens. Il n'y en a pas de grands comme à Beyrouth ou Tripoli.
  • Je suis originaire de Zgharta et Ehden, je suis un pur zghortiote! Avant de faire ce travail, j'installais des chauffages, puis je suis tombé malade et j'ai dû arrêter ce travail et en trouver un autre. J'ai les deux supermarchés depuis l’année 2000. Je travaille 8 mois de l'année à Zgharta puis 4 mois à Ehden. Ma vie est très différente entre le moment où je suis à Ehden et celui où je suis à Zgharta. À Ehden, j'ouvre le supermarché à 8h30 et je le ferme entre 2 heures et 4 heures du matin. À Zgharta, j'ouvre entre 8 heures du matin et 10 heures du soir. Quand j'ouvre un des deux supermarchés, je ferme l'autre et j'amène toute la marchandise d'un supermarché à l'autre avec un pick'up. J’ai besoin de faire trois voyages pour tout déménager. A Ehden comme à Zgharta, la plupart des supermarchés ressemblent aux miens. Il n'y en a pas de grands comme à Beyrouth ou Tripoli.
  • Il y a quelque chose d’organique dans le rapport entre lieu de vie et famille. Il y a souvent à Ehden le cas d’un lot qui appartenait à un grand-père qui a eu des enfants qui vivent sur le même lot et eux aussi ont eu des enfants qui restent sur le même lot. Moi je suis dans ce cas : mon père a construit une grande maison avec 8 chambres à coucher et nous sommes 4 enfants, alors maintenant que nous sommes tous mariés, chaque famille a une ou deux chambres dans la maison. Suivant la saison, on change de vie sociale : en hiver, tout le monde est seul et l’été tout le monde se réunit. On n’a pas la même vie à Zgharta et Ehden. C’est un mode de vie normal pour nous, on ne peut pas imaginer rester au même endroit toute l’année. Depuis 5 ou 6 ans, il y a des gens qui restent à Zgharta par manque d’argent. Le niveau de vie commence à baisser beaucoup au Liban. Cette année, j’ai été surpris de voir autant de monde à Zgharta après 17 heures.
  • Il y a quelque chose d’organique dans le rapport entre lieu de vie et famille. Il y a souvent à Ehden le cas d’un lot qui appartenait à un grand-père qui a eu des enfants qui vivent sur le même lot et eux aussi ont eu des enfants qui restent sur le même lot. Moi je suis dans ce cas : mon père a construit une grande maison avec 8 chambres à coucher et nous sommes 4 enfants, alors maintenant que nous sommes tous mariés, chaque famille a une ou deux chambres dans la maison. Suivant la saison, on change de vie sociale : en hiver, tout le monde est seul et l’été tout le monde se réunit. On n’a pas la même vie à Zgharta et Ehden. C’est un mode de vie normal pour nous, on ne peut pas imaginer rester au même endroit toute l’année. Depuis 5 ou 6 ans, il y a des gens qui restent à Zgharta par manque d’argent. Le niveau de vie commence à baisser beaucoup au Liban. Cette année, j’ai été surpris de voir autant de monde à Zgharta après 17 heures.
  • Mon mari était originaire d’ici mais moi je viens d’un petit village à côté de Zgharta, je ne suis pas une pure zghortiote! Je suis devenue zghortiote parce que j’y vis depuis 50 ans. C’est depuis que je me suis mariée que je fais le voyage de Ehden à Zgharta tous les ans. J’ai beaucoup aimé Ehden dès le début et j’y passe 5 mois par an car j’ouvre mon restaurant à partir de fin mai et je ne ferme que fin octobre ou début novembre. Mon mari a commencé à louer ici en 1968 et depuis, je continue à ouvrir le restaurant tous les ans durant l’été. Avant de quitter le restaurant et fermer pour l’hiver, il faut tout ranger dedans et on ferme. Après, je vais préparer ma maison à Zgharta. Lorsque je suis à Ehden, je ne quitte pas le restaurant, je passe tout mon temps sur cette place, au Miden avec ma sœur qui m’aide. Je travaille au restaurant à Ehden et à Zgharta, je travaille un peu de chez moi ; je prépare des repas à emporter pour des gens. Il y a des hivers où je vais en Australie chez ma sœur. J’y étais pendant 4 mois l’année dernière.
  • Mon mari était originaire d’ici mais moi je viens d’un petit village à côté de Zgharta, je ne suis pas une pure zghortiote! Je suis devenue zghortiote parce que j’y vis depuis 50 ans. C’est depuis que je me suis mariée que je fais le voyage de Ehden à Zgharta tous les ans. J’ai beaucoup aimé Ehden dès le début et j’y passe 5 mois par an car j’ouvre mon restaurant à partir de fin mai et je ne ferme que fin octobre ou début novembre. Mon mari a commencé à louer ici en 1968 et depuis, je continue à ouvrir le restaurant tous les ans durant l’été. Avant de quitter le restaurant et fermer pour l’hiver, il faut tout ranger dedans et on ferme. Après, je vais préparer ma maison à Zgharta. Lorsque je suis à Ehden, je ne quitte pas le restaurant, je passe tout mon temps sur cette place, au Miden avec ma sœur qui m’aide. Je travaille au restaurant à Ehden et à Zgharta, je travaille un peu de chez moi ; je prépare des repas à emporter pour des gens. Il y a des hivers où je vais en Australie chez ma sœur. J’y étais pendant 4 mois l’année dernière.
  • Ma famille est originaire d'ici depuis toujours, on est toujours allés de Ehden à Zgharta. Lorsqu'on va d'une maison à l'autre, normalement on ne prend que les habits, mais il y a quelques familles qui transportent encore toutes leurs affaires. Depuis 500 ans c'est comme ça. Aujourd'hui on suit le rythme des écoles, avant c'était le rythme de l'agriculture. On montait après Pâques et on descendait après la fête de la Croix. 

    Depuis quelques années, il y a plus de gens qui restent à Zgharta toute l’année parce que Ehden devient très chère. Louer une maison à Ehden l'été c'est le même prix que de louer une maison pour l'année à Zgharta. Alors Zgharta ne se vide plus qu’à moitié l'été alors que Ehden continue de se vider l'hiver. Pendant l'été tout le monde est à Ehden, les familles et les jeunes qui vivent à l'étranger reviennent ici. Je trouve que cet attachement à Ehden est encore plus fort pour eux que pour nous.
  • Ma famille est originaire d'ici depuis toujours, on est toujours allés de Ehden à Zgharta. Lorsqu'on va d'une maison à l'autre, normalement on ne prend que les habits, mais il y a quelques familles qui transportent encore toutes leurs affaires. Depuis 500 ans c'est comme ça. Aujourd'hui on suit le rythme des écoles, avant c'était le rythme de l'agriculture. On montait après Pâques et on descendait après la fête de la Croix. 

    Depuis quelques années, il y a plus de gens qui restent à Zgharta toute l’année parce que Ehden devient très chère. Louer une maison à Ehden l'été c'est le même prix que de louer une maison pour l'année à Zgharta. Alors Zgharta ne se vide plus qu’à moitié l'été alors que Ehden continue de se vider l'hiver. Pendant l'été tout le monde est à Ehden, les familles et les jeunes qui vivent à l'étranger reviennent ici. Je trouve que cet attachement à Ehden est encore plus fort pour eux que pour nous.
  • J’aime Ehden et Zgharta parce qu’on y a des modes de vie différents : je préfère Zgharta durant l’hiver et Ehden durant l’été. Chacune est unique, l’une en bord de mer, l’autre dans la montagne. Je suis née ici, j’ai grandi ici, je travaille ici et j’ai toujours vécu entre Ehden et Zgharta. Mais je n’aime pas Ehden durant l’hiver alors que d’autres vont aimer y aller lorsqu’il y a de la neige ; chacun a son opinion là-dessus. 

    C’est très particulier notre mode de vie et le fait que nous migrions suivant les saisons. Pour la plupart, nous avons hérité des anciennes générations une maison en haut et une en bas mais ce n’est pas le cas de tout le monde maintenant. Alors les nouvelles générations font construire leurs maisons dans les deux villes ou les louent pour continuer à vivre une partie de l’année à Ehden et l’autre à Zgharta parce que c’est notre mode de vie, c’est comme cela qu’on veut vivre. Les enfants attendent que l’hiver passent pour retourner à Ehden mais moi je ne suis pas de cet avis. J’aime ma vie à Zgharta aussi. 
  • J’aime Ehden et Zgharta parce qu’on y a des modes de vie différents : je préfère Zgharta durant l’hiver et Ehden durant l’été. Chacune est unique, l’une en bord de mer, l’autre dans la montagne. Je suis née ici, j’ai grandi ici, je travaille ici et j’ai toujours vécu entre Ehden et Zgharta. Mais je n’aime pas Ehden durant l’hiver alors que d’autres vont aimer y aller lorsqu’il y a de la neige ; chacun a son opinion là-dessus. 

    C’est très particulier notre mode de vie et le fait que nous migrions suivant les saisons. Pour la plupart, nous avons hérité des anciennes générations une maison en haut et une en bas mais ce n’est pas le cas de tout le monde maintenant. Alors les nouvelles générations font construire leurs maisons dans les deux villes ou les louent pour continuer à vivre une partie de l’année à Ehden et l’autre à Zgharta parce que c’est notre mode de vie, c’est comme cela qu’on veut vivre. Les enfants attendent que l’hiver passent pour retourner à Ehden mais moi je ne suis pas de cet avis. J’aime ma vie à Zgharta aussi. 
  • Notre arrière-grand-oncle Youssef a construit cette maison à la fin du XIXème siècle. Oncle Youssef était ce qu’on appelle un ehdenien. Il ne descendait pas du tout à Zgharta. Il restait à Ehden l’hiver, il supportait tout. C’était un choix très risqué de construire cette maison-là, à Ain El Whasch (La Fontaine du Fauve), loin du village. Sachant que la tradition voulait que les gens se regroupent au sein du village, pour faire face aux dangers, s’entraider en cas de maladies, et parce que les hivers sont rudes à Ehden et qu’avant, il n’y avait pas les moyens d’y faire face comme aujourd’hui.

    Aller d’Ehden à Zgharta est un peu compliqué pour l’organisation de notre vie. Certes, tout le mobilier va rester dans chaque maison. Mais, dans mon cas, je ne peux que déplacer mes nombreux tableaux, car je ne peux pas me séparer d’eux, ainsi que plusieurs dizaines de mes centaines d’ouvrages, répartis entre la ville de la haute-montagne et celle de la plaine. 
  • Notre arrière-grand-oncle Youssef a construit cette maison à la fin du XIXème siècle. Oncle Youssef était ce qu’on appelle un ehdenien. Il ne descendait pas du tout à Zgharta. Il restait à Ehden l’hiver, il supportait tout. C’était un choix très risqué de construire cette maison-là, à Ain El Whasch (La Fontaine du Fauve), loin du village. Sachant que la tradition voulait que les gens se regroupent au sein du village, pour faire face aux dangers, s’entraider en cas de maladies, et parce que les hivers sont rudes à Ehden et qu’avant, il n’y avait pas les moyens d’y faire face comme aujourd’hui.

    Aller d’Ehden à Zgharta est un peu compliqué pour l’organisation de notre vie. Certes, tout le mobilier va rester dans chaque maison. Mais, dans mon cas, je ne peux que déplacer mes nombreux tableaux, car je ne peux pas me séparer d’eux, ainsi que plusieurs dizaines de mes centaines d’ouvrages, répartis entre la ville de la haute-montagne et celle de la plaine. 
  • Je viens de Ehden qui est notre ville d’origine. Je me souviens que mes parents prenaient leurs bagages et les mettaient dans un taxi : ils prenaient tout, les vêtements, le frigo, les lits et montaient pour trois mois à Ehden, puis redescendaient tout à Zgharta pour l’hiver. Maintenant on continue de passer d’une maison à l’autre, mais on a tout en double. Ce qui me semble le plus surprenant, c’est que ce sont deux villes différentes mais on y voit les mêmes personnes, les mêmes visages.

    Il y a quelques années, j’ai fait le choix de revenir vivre au Liban. Je suis diplômé d’une université canadienne, je parle plusieurs langues, j’ai pas mal d’expérience professionnelles dans des emplois très bien payés mais j’ai ressenti le besoin de rentrer vivre à Ehden pour mon bien-être, pour être proche de ma famille et dans mon pays. J’adore le Canada mais aucun endroit n’est chez moi là-bas, ma maison est au Liban, à Ehden. Je me sens comme un poisson dans l’eau ici. Et si je ne suis plus au Liban, je ne peux pas survivre, je me sens suffoquer. J’aime ma vie de maintenant et je m’en contente bien.
  • Je viens de Ehden qui est notre ville d’origine. Je me souviens que mes parents prenaient leurs bagages et les mettaient dans un taxi : ils prenaient tout, les vêtements, le frigo, les lits et montaient pour trois mois à Ehden, puis redescendaient tout à Zgharta pour l’hiver. Maintenant on continue de passer d’une maison à l’autre, mais on a tout en double. Ce qui me semble le plus surprenant, c’est que ce sont deux villes différentes mais on y voit les mêmes personnes, les mêmes visages.

    Il y a quelques années, j’ai fait le choix de revenir vivre au Liban. Je suis diplômé d’une université canadienne, je parle plusieurs langues, j’ai pas mal d’expérience professionnelles dans des emplois très bien payés mais j’ai ressenti le besoin de rentrer vivre à Ehden pour mon bien-être, pour être proche de ma famille et dans mon pays. J’adore le Canada mais aucun endroit n’est chez moi là-bas, ma maison est au Liban, à Ehden. Je me sens comme un poisson dans l’eau ici. Et si je ne suis plus au Liban, je ne peux pas survivre, je me sens suffoquer. J’aime ma vie de maintenant et je m’en contente bien.
  • Ma famille est là depuis toujours. Douaihy est une très vieille famille de Zgharta. Quand j'étais petite, on allait de Ehden à Zgharta en taxi. On y passait l’été et on descendait en septembre à Zgharta pour la rentrée à l'école. Pendant 27 ans, je n'ai pu aller à Ehden qu'en journée parce que je n'avais plus de maison là-bas. Celle qu’avait notre famille a été donnée à mon oncle qui vivait en Australie. Mais depuis 3 ans, j'ai de nouveau une maison à Ehden. Chaque mois, je paie un loyer pour l’appartement à Zgharta, avant c’était 600 dollars et maintenant 100 dollars ; dans 7 ans il sera à nous. Pour Ehden, c'est 300 dollars chaque mois durant 3 ans. Je travaille très dur pour cela et mes enfants sont très contents de pouvoir aller à Ehden l'été. 
  • Ma famille est là depuis toujours. Douaihy est une très vieille famille de Zgharta. Quand j'étais petite, on allait de Ehden à Zgharta en taxi. On y passait l’été et on descendait en septembre à Zgharta pour la rentrée à l'école. Pendant 27 ans, je n'ai pu aller à Ehden qu'en journée parce que je n'avais plus de maison là-bas. Celle qu’avait notre famille a été donnée à mon oncle qui vivait en Australie. Mais depuis 3 ans, j'ai de nouveau une maison à Ehden. Chaque mois, je paie un loyer pour l’appartement à Zgharta, avant c’était 600 dollars et maintenant 100 dollars ; dans 7 ans il sera à nous. Pour Ehden, c'est 300 dollars chaque mois durant 3 ans. Je travaille très dur pour cela et mes enfants sont très contents de pouvoir aller à Ehden l'été. 
  • Je suis française et je me suis mariée avec un libanais il y a 40 ans. On s'est d'abord installés à Beyrouth et puis il y a eu les évènements, on a été obligés de venir à Zgharta, soi-disant pour un été et on y est resté 17 ans. Depuis la première année de mariage, on va de Ehden à Zgharta. Avant, on louait une maison, puis on a construit cet immeuble avec les frères de mon mari. Lorsqu'on monte à Ehden, on ne vit plus à Zgharta et vice versa. On monte vers le 15 juin et on descend fin octobre début novembre. La maison de Zgharta est fermée durant ce temps, on ferme l'électricité et le gaz, on enlève les tapis, on recouvre les canapés avec des housses pour qu'il n'y ait pas trop de poussière et ensuite on descend et on passe quatre jours à faire le ménage. En été, Ehden ne dort pas, il y a des embouteillages en pleine nuit, parce que les zghortiotes aiment vivre, ils ne sont pas fourmis, ils sont cigales. C'est grâce à cela qu’il peut y avoir autant de commerces ici.
  • Je suis française et je me suis mariée avec un libanais il y a 40 ans. On s'est d'abord installés à Beyrouth et puis il y a eu les évènements, on a été obligés de venir à Zgharta, soi-disant pour un été et on y est resté 17 ans. Depuis la première année de mariage, on va de Ehden à Zgharta. Avant, on louait une maison, puis on a construit cet immeuble avec les frères de mon mari. Lorsqu'on monte à Ehden, on ne vit plus à Zgharta et vice versa. On monte vers le 15 juin et on descend fin octobre début novembre. La maison de Zgharta est fermée durant ce temps, on ferme l'électricité et le gaz, on enlève les tapis, on recouvre les canapés avec des housses pour qu'il n'y ait pas trop de poussière et ensuite on descend et on passe quatre jours à faire le ménage. En été, Ehden ne dort pas, il y a des embouteillages en pleine nuit, parce que les zghortiotes aiment vivre, ils ne sont pas fourmis, ils sont cigales. C'est grâce à cela qu’il peut y avoir autant de commerces ici.
  • J’ai ma maison à Zgharta et ma maison à Ehden, je suis propriétaire des deux maisons. Dans les deux maisons, je vis avec mon fils et ma belle-fille. A Ehden, elle est juste à côté de la municipalité où je travaille. Je préfère à Ehden parce que tout est proche de chez moi, les commerces et le travail. A Zgharta, c’est plus compliqué parce que je vis dans un endroit excentré et je n’ai pas de voiture. J’ai plus de difficulté à me déplacer alors qu’à Ehden, je peux me promener à pied dans le centre-ville, aller au Cobra et au Miden sans voiture. Ca fait 15 ans que je travaille à la municipalité. Lorsque mon mari est décédé, j’ai dû trouver un travail pour élever mes deux enfants. Je travaille de 7h30 à 14h30 à Ehden et de 7h30 à 15h30 à Zgharta mais la principale différence est le fait que j’aille travailler à pied à Ehden et que je sois obligée de trouver quelqu’un pour me conduire en voiture à Zgharta. J’aime beaucoup Ehden, mais même à la retraite, je continuerai à ne venir que l’été et à passer mes hivers à Zgharta. 
  • J’ai ma maison à Zgharta et ma maison à Ehden, je suis propriétaire des deux maisons. Dans les deux maisons, je vis avec mon fils et ma belle-fille. A Ehden, elle est juste à côté de la municipalité où je travaille. Je préfère à Ehden parce que tout est proche de chez moi, les commerces et le travail. A Zgharta, c’est plus compliqué parce que je vis dans un endroit excentré et je n’ai pas de voiture. J’ai plus de difficulté à me déplacer alors qu’à Ehden, je peux me promener à pied dans le centre-ville, aller au Cobra et au Miden sans voiture. Ca fait 15 ans que je travaille à la municipalité. Lorsque mon mari est décédé, j’ai dû trouver un travail pour élever mes deux enfants. Je travaille de 7h30 à 14h30 à Ehden et de 7h30 à 15h30 à Zgharta mais la principale différence est le fait que j’aille travailler à pied à Ehden et que je sois obligée de trouver quelqu’un pour me conduire en voiture à Zgharta. J’aime beaucoup Ehden, mais même à la retraite, je continuerai à ne venir que l’été et à passer mes hivers à Zgharta.